Instantanés de notre monde - La honte

C'est assez rare que je regarde la télévision. Je ne l'ai jamais beaucoup fait, mais depuis que nous avons emmenagé ici, et depuis qu'il y a chez nous une pièce réservée à cet usage...eh bien c'est la pièce que je fréquente le moins..., et donc je ne regarde la télévision que par choix, par décision, quand je me dis, comme hier soir par exemple : "Tiens, ce soir, je vais regarder le Journal". J'entends par Journal les informations, et sur la première chaîne car je manque d'imagination... Bref. Autant le dire tout de suite : une demi-heure d'information, c'est tout ce que je peux supporter. Parce que franchement, les infos, c'est la honte...

Tout d'abord, une petite intervention concernant les Rest@s du C@eur. Ca, c'est vraiment une association que j'aime bien, que je soutiens fidèlement, et dont j'épouse les causes. Alors, évidemment, j'écoute... Et j'apprends ( si je l'ignorais) que cette année, on dépassera le million de "bénéficiaires" ; que les pauvres n'ont jamais été aussi pauvres ; les mères seules aussi seules ; les vieux abandonnés aussi abandonnés. Premier réflexe d'indignation. J'ai été élevée par une mère seule, je sais quelle galère c'est, alors je me promets, pour cet hiver, d'être encore un peu plus fidèle. Je trouve que c'est la honte de notre époque, la honte de notre société. Mais bon... à ce stade-là, j'écoute encore.

Vient ensuite un sujet édifiant sur de vaillants supporters de football qui, en moins de temps qu'il n'en faut pour l'écrire, mettent à sac un stade flambant neuf, sous l'oeil impuissant mais médusé de toutes les caméras. Ma fille m'interroge : "Mais pourquoi font-ils ça?" Je hausse les sourcils. Va savoir... Gros plans sur des visages imbibés d'une haine féroce et incontrôlable. La honte...

Et alors là - le coup de grâce. Petit reportage, comme ça, l'air de rien, sur ce village hongrois dirigé par l'extrême-droite et qui a institué, visiblement au su de tous et en plein coeur de l'Europe, une véritable politique ultra-nationaliste : défilés de milices au pas cadencé, ségrégation assumée et revendiquée, travail forcé, et j'en passe et des meilleures... Alors, je hurle.  A mon tour, j'interroge, sous les yeux de ma fille atterrée, le poste de télévision. Quoi?! Et on laisse faire ça?! Mais au nom de quelle démocratie?! Alors tout ça, tous ces efforts et ce sang versé, ces conférences, ces tribunaux, ça n'a servi à rien?! Mais qui sommes-nous, qui laissons faire?! Je me lève et je m'indigne. Car, ça, mes amis, ça passe tout et c'est insupportable. Et, ça, c'est véritablement la honte.

Alors voilà. Le Journal se referme sur le portrait d'Alexandre Tharaud, le pianiste incroyable, magique, virtuose, et je soupire, car tous les hommes de cette Terre ne vivent pas dans le même monde. Malheureusement. Merci quand même à quelques-uns... d'exister. Le Monde a définitivement besoin d'eux.